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CHAPITRE XVI.


LES CHRÉTIENS ET L’OPINION PUBLIQUE.


Pour être juste, il faut se représenter les préjugés où vivait fatalement le public d’alors. On connaissait extrêmement mal le christianisme[1]. Le bas peuple n’aime pas qu’on se distingue, qu’on vive à part de lui, qu’on soit plus puritain que lui, qu’on s’abstienne de ses fêtes, de ses usages. Quand on se cache, il suppose toujours qu’on a quelque chose à cacher. De tout temps, les cultes secrets ont provoqué certaines calomnies, toujours les mêmes[2]. Le mystère dont ils s’entourent fait croire à des débauches contre nature, à des infanticides, à des incestes,

  1. Justin, Apol. II, 3.
  2. Cela se vit déjà, lors de la proscription des bacchanales. Tite-Live, XXXIX, 8. Voir la façon dont Lucien présente le culte d’Abonotique. Alex., 39 et suiv. Les calomnies dont le culte juif était l’objet au moyen âge, et qui, dans certains pays, n’ont pas encore disparu, se rattachent au même ordre d’idées.