Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/522

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ses procédés d’amplification, ses machines pieuses de mise en scène, sont le prélude des Évangiles apocryphes. Les auteurs de ces derniers appliquent à outrance la rhétorique sacrée dont Luc fait un emploi discret. Ils innovent peu, ils imitent et exagèrent. Ils font pour les Évangiles canoniques ce que les auteurs des Post-homerica ont fait pour Homère, ce que les auteurs relativement modernes de Dionysiaques ou d’Argonautiques ont fait pour l’épopée grecque. Ils traitent les parties que les canoniques ont avec raison négligées ; ils ajoutent ce qui aurait pu arriver, ce qui paraissait vraisemblable ; ils développent les situations par des rapprochements artificiels empruntés aux textes sacrés. Quelquefois, enfin, ils procèdent par monographies et cherchent à faire une légende à tous les personnages évangéliques, en réunissant les traits épars qui les concernent. Tout se borne ainsi à broder sur un canevas donné[1]. Bien éloignés de l’assurance des anciens évangélistes, qui parlent comme inspirés d’en haut, et poussent hardiment chacun de leur côté les branches de leur récit,

  1. Un curieux écrit de nos jours, la Douloureuse passion, rédigée par Brentano d’après les visions de Catherine Emmerich, présente le même caractère et peut être tenu pour le dernier des Évangiles apocryphes. Comparez aussi la Cité mystique de Marie d’Agreda.