Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/40

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La Loi ne paraît pas avoir eu pour lui beaucoup de charme ; il crut pouvoir mieux faire. Mais la poésie religieuse des psaumes se trouva dans un merveilleux accord avec son âme lyrique ; ils restèrent toute sa vie son aliment et son soutien. Les prophètes, Isaïe, en particulier, et son continuateur du temps de la captivité, avec leurs brillants rêves d’avenir, leur impétueuse éloquence, leurs invectives entremêlées de tableaux enchanteurs, furent ses véritables maîtres. Il lut aussi sans doute plusieurs des ouvrages apocryphes, c’est-à-dire de ces écrits assez modernes, dont les auteurs, pour se donner une autorité qu’on n’accordait plus qu’aux écrits très-anciens, se couvraient du nom de prophètes et de patriarches. Un de ces livres surtout le frappa : c’est le livre de Daniel. Ce livre, composé par un Juif exalté du temps d’Antiochus Épiphane, et mis par lui sous le couvert d’un ancien sage, était le résumé de l’esprit des derniers temps. Son auteur, vrai créateur de la philosophie de l’histoire, avait pour la première fois osé ne voir dans le mouvement du monde et la succession des empires qu’une série de faits subordonnée aux destinées du peuple juif. Jésus fut pénétré de bonne heure de ces hautes espérances. Peut-être lut-il aussi les livres d’Hénoch, alors révérés à l’égal des livres saints, et les autres écrits du même genre, qui entretenaient un si grand mouvement dans l’imagination populaire. L’avénement du Messie avec ses gloires et ses terreurs, les nations