Page:Renan - La Vie de Jésus.djvu/412

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cesser d’être juif, on ne devenait pas romain ; on restait sans défense sous le coup d’une législation théocratique de la plus atroce sévérité. Un jour, les bas officiers du temple, qui avaient assisté à un des discours de Jésus et en avaient été enchantés, vinrent confier leurs doutes aux prêtres : « Est-ce que quelqu’un des princes ou des pharisiens a cru en lui ? leur fut-il répondu ; toute cette foule, qui ne connaît pas la Loi, est une canaille maudite. » Jésus restait ainsi à Jérusalem un provincial admiré des provinciaux comme lui, mais repoussé par toute l’aristocratie de la nation. Les chefs d’écoles et de sectes étaient trop nombreux pour qu’on fût fort ému d’en voir paraître un de plus. Sa voix eut à Jérusalem peu d’éclat. Les préjugés de race et de secte, les ennemis directs de l’esprit de l’évangile, y étaient trop enracinés.

Son enseignement, dans ce monde nouveau, se modifia nécessairement beaucoup. Ses belles prédications, dont l’effet était toujours calculé sur la jeunesse de l’imagination et la pureté de la conscience morale des auditeurs, tombaient ici sur la pierre. Lui, si à l’aise au bord de son charmant petit lac, était gêné, dépaysé en face des pédants. Ses affirmations