Page:Renan - Lettres intimes 1842-1845, calmann-levy, 1896.djvu/147

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de ce qui s’est passé. Peut-être traiteras-tu ma conduite d’irrésolution : reconnais au moins que le sujet le comportait, s’il en fut jamais. Dieu sait si l’inconstance et la légèreté ont eu quelque part à mes motifs. Si j’ai commis quelque faute, en tout ceci, c’est, peut-être, lorsque l’affaire sembla prendre une tournure plus décisive, de l’avoir présentée à maman sous un point de vue trop positif, et peut-être d’avoir fait naître en elle des espérances qui lui étaient chères et que j’ai ensuite été obligé de lui ravir. C’est là, je te l’avoue, le point qui m’a été de beaucoup le plus sensible : il m’a fallu rappeler tout mon courage pour suivre la voix de ma conscience, contre celle du sang et de la tendresse, dans une occasion où je craignais de causer une vive peine à la plus chérie des mères. Ses lettres ont semblé me témoigner qu’elle n’en avait pas été trop affectée ; néanmoins les terribles appréhensions que j’en ai conçues seront pour moi une grande leçon pour l’avenir.

Du reste, ma bonne Henriette, tu vas peut-être être surprise, quand je te dirai que