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MADEMOISELLE RENAN
Au château de Clemensow, près Zamosc (Pologne).


Paris, le 11 juillet 1844.

Je veux, avant d’aller embrasser notre bonne mère, ma chère et excellente Henriette m’entretenir encore une fois avec toi. Je pense que quand tu recevras ces lignes, je serai bien près de me réunir à elle, mon départ étant fixé du 20 au 25 de ce mois. Cette pensée depuis longtemps m’occupe tout entier ; elle est le centre naturel où se portent mes désirs et mes espérances, dans les moments où je les laisse libres de suivre leur pente naturelle. La vie solitaire a sans doute ses douceurs ; mais quand elle est dénuée de ces douces affections qui sont la vie de l’âme, et quand, avec cela, elle est longtemps prolongée, elle devient un cruel supplice. Figure-toi que pendant les dix mois que je viens de passer