Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/309

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ques. Le vénérable Pothin, âgé de plus de quatre-vingt-dix ans, avait la tâche difficile de gouverner ces âmes, plus ardentes que soumises, et qui cherchaient dans la soumission même autre chose que le charme austère du devoir accompli.

Irénée était devenu le bras droit de Pothin, son coadjuteur, si l’on peut s’exprimer ainsi, son successeur désigné[1]. Écrivain abondant et controversiste exercé, il se mit, dès son arrivée à Lyon, à écrire en grec contre toutes les tendances chrétiennes différentes de la sienne, en particulier contre Blastus, qui voulait revenir au judaïsme, et contre Florin, qui admettait, avec les gnostiques, un Dieu du bien et un Dieu du mal[2]. Les doctrines de Valentin, par leur largeur et leur apparence philosophique, gagnaient beaucoup d’adeptes dans la population lyonnaise[3]. Irénée se fit une sorte de spécialité de les combattre. Aucun polémiste orthodoxe, avant lui, n’avait à ce point compris les profondeurs de la gnose et son caractère antichrétien[4].

  1. Eusèbe, H. E., V, ch. iv, fragment de la lettre des confesseurs à Éleuthère.
  2. Eusèbe, H. E., V, ch. xv et xx. J’ai donné la traduction de la belle lettre à Florin dans l’appendice à la suite de l’Antechrist, p. 564-565.
  3. Voir Le Blant, Inscr. chrét., II, no  478.
  4. Irénée, Adv. hær., IV, prœm.