Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/326

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d’autres fidèles plus dignes du martyre vinrent combler les vides que l’apostasie avait laissés dans les rangs de la phalange élue. La persécution s’étendit bientôt à l’Église de Vienne, qui d’abord, ce semble, avait été épargnée. L’élite des deux Églises, presque tous les fondateurs du christianisme gallo-grec, se trouvèrent réunis dans les prisons de Lyon, prêts à l’assaut redoutable qui allait leur être livré. Irénée ne subit pas de détention ; il fut de ceux qui entouraient les confesseurs, qui virent toutes les particularités de leur combat, et c’est à lui peut-être que nous en devons le récit. Le vieux Pothin, au contraire, fut de bonne heure, sinon dès le commencement, réuni à ses fidèles ; il suivit jour par jour leurs souffrances, et, tout mourant qu’il était, il ne cessa de les instruire, de les encourager.

Selon l’usage dans les grandes instructions criminelles[1], on arrêta les esclaves en même temps que leurs maîtres ; or, plusieurs de ces esclaves étaient païens. Les tortures qu’ils voyaient infliger à leurs maîtres les effrayèrent ; les soldats de l’officium leur soufflèrent ce qu’il fallait dire pour échapper à la question. Ils déclarèrent que les infanticides, les repas de chair humaine, les incestes étaient des réali-

  1. Cod. Just., IX, xli, 1 ; Digeste, XLVIII, xviii, 1, 8.