Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/374

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immortels le fumier, la pourriture[1] ! Celse triomphe, en opposant à ce matérialisme religieux son idéalisme pur, son Dieu absolu, qui ne se manifeste pas dans la trame des choses finies[2].


Juifs et chrétiens me font l’effet d’une troupe de chauves-souris, ou de fourmis sortant de leur trou, ou de grenouilles établies près d’un marais, ou de vers tenant séance dans les coins d’un bourbier…, et se disant entre eux : « C’est à nous que Dieu révèle et annonce d’avance toute chose ; il n’a aucun souci du reste du monde ; il laisse les cieux et la terre rouler à leur guise pour ne s’occuper que de nous. Nous sommes les seuls êtres avec lesquels il communique par des messagers, les seuls avec lesquels il désire lier société ; car il nous a faits semblables à lui. Tout nous est subordonné, la terre, l’eau, l’air et les astres ; tout a été fait pour nous et destiné à notre service, et c’est parce qu’il est arrivé à certains d’entre nous de pécher que Dieu lui-même viendra ou enverra son propre fils pour brûler les méchants et nous faire jouir avec lui de la vie éternelle[3]. »


La discussion de la vie de Jésus est conduite exactement selon la méthode de Reimarus ou de Strauss. Les impossibilités du récit évangélique, si on le prend comme de l’histoire, n’ont jamais mieux été montrées[4]. L’apparition de Dieu en Jésus semble à

  1. Orig., V, 14 ; VII, 32 ; VIII, 53.
  2. Ibid., VII, 36.
  3. Celse, dans Orig., IV, 23.
  4. Orig., I, 54, 67, 69, 70, 71 ; III, 41, 42 ; VI, 73, 75, 78, 81 ; VII, 2, 3, 14, 18.