Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/390

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futer[1]. L’effet du livre fut donc très peu étendu. Au ive siècle, Hiéroclès et Julien s’en servirent et le copièrent presque ; mais il était trop tard. Celse n’enleva probablement pas un seul disciple à Jésus. Il avait raison au point de vue du bon sens naturel ; mais le simple bon sens, quand il se trouve en opposition avec les besoins du mysticisme, est bien peu écouté. Le sol n’avait pas été préparé par un bon ministère de l’instruction publique. Il faut se rappeler que l’empereur n’était pas lui-même exempt de toute attache au surnaturel ; les meilleurs esprits du siècle admettaient les songes médicaux et les guérisons miraculeuses dans les temples des dieux. Le nombre des rationalistes purs, si considérable au ier siècle, est maintenant très restreint. Les esprits qui, comme le Cæcilius de Minicius Felix, avouent une sorte d’athéisme, n’en tiennent que plus énergiquement pour le culte établi[2]. Dans la seconde moitié du iie siècle, nous ne voyons réellement qu’un seul homme qui, étant supérieur à toute superstition, eût bien le droit de sourire de toutes les folies hu-

  1. Orig., Contre Celse, préf., 3, 5. Les allusions à Celse qu’on a cru remarquer dans Minucius Félix et dans Tertullien ne prouvent pas que ces derniers eussent lu dans l’original l’écrit même de Celse.
  2. Octavius, 5, 7. V. ci-après, p. 393 et suiv. Cæcilius, d’ailleurs, admet les prédictions (§ 7).