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si ses moyens le lui permettaient, son image dans sa maison. Et il n’en fut pas de ce culte comme de tant d’autres apothéoses éphémères. Cent ans après, la statue de Marc-Antonin se voyait dans un grand nombre de laraires, entre les dieux pénates. L’empereur Dioclétien avait pour lui un culte à part[1]. Le nom d’Antonin désormais fut sacré. Il devint, comme celui de César et d’Auguste, une sorte d’attribut de l’empire, un signe de la souveraineté humaine et civile[2]. Le numen Antoninum[3] fut comme l’astre bienfaisant de cet empire dont le programme admirable resta, pour le siècle qui suivit, un reproche, une espérance, un regret. On vit des âmes aussi peu poétiques que celle de Septime-Sévère en rêver comme d’un ciel perdu[4]. Même Constantin s’inclina devant cette divinité clémente et voulut que la statue d’or des Antonins comptât parmi celles des ancêtres et des tuteurs de son pouvoir[5], fondé pourtant sous de tout autres auspices.

Jamais culte ne fut plus légitime, et c’est le nôtre

  1. Jules Capitolin, Ant. Phil., 18, 19.
  2. Capitolin, Macrin, 3, 7, 10 ; Spartien, Sept. Sev., 19 ; Caracalla, 9 ; Géta, 2 ; Lampride, Diadumène, 1, 2, 3, 6 ; Héliog., 1, 2, 3, 17, 18, 34 ; Alex. Sev., 5-12 ; Capitolin, les Gordiens, 4.
  3. Lampride, Héliog., 3.
  4. Spartien, Sév., 20, 22.
  5. Lampride, Héliog., 2.