Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/539

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L’église n’avait rien du temple[1] ; car on maintenait comme un principe absolu que Dieu n’a pas besoin de temple, que son vrai temple, c’est le cœur de l’homme juste[2]. Elle n’avait sûrement aucune architecture qui la fît reconnaître ; c’était cependant déjà un édifice à part[3] ; on l’appelait « la maison du Seigneur[4] », et les sentiments les plus tendres de la piété chrétienne commençaient à s’y attacher. Les réunions de nuit, justement parce qu’elles étaient interdites par la loi[5], avaient un grand charme pour l’imagination[6]. Au fond, quoique le vrai chrétien eût les temples en aversion, l’église aspirait secrètement à devenir temple[7] ; elle le devint tout à fait au moyen âge ; la chapelle et l’église de nos jours sont bien

  1. Min. Fél., 10, 32 ; Celse, dans Orig., VII, 62.
  2. Clém. d’Alex., Strom., V, 11 ; VII, 5. Pour les doctrines analogues des stoïciens, voir Bernays, Die herakl. Briefe, p. 30 et suiv.
  3. Sacraria. Min. Fél., 9.
  4. Οἶκος κυριακός. Clém. d’Alex., Strom., III, 18. Vers l’an 236, églises brûlées : Orig., In Matth. comm. series, xxviii, p. 857, Delarue (III).
  5. Porcius Latro, Declam. in Catil., ch. xix ; Schœll, Duod. tab., p. 151 ; Cicéron, De legibus, II, 9 ; Paul, Sentent., V, xxiii, 9 ; Code Théod., loi 7 de malef. (IX, xvi) ; loi 5 de paganis, (XVI, x) ; Zosime, IV, 3.
  6. Pline, Epist., X, 97 ; Min. Félix, 8, 9 ; Tertullien, Ad ux., II, 4 ; De corona, 3 ; De fuga, 11.
  7. Curieuse remarque de Macarius Magnes, l. IV, ch. xxi, fin (p. 201, Blondel).