Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/576

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la fin du iiie siècle[1], c’est que, jusque-là, l’Église est un vrai monastère, une cité idéale où se pratique la vie parfaite. Quand le siècle entrera en masse dans l’Église, quand le concile de Gangres, en 325, aura déclaré que les maximes de l’Évangile sur la pauvreté, sur le renoncement à la famille, sur la virginité, ne sont pas à l’adresse des simples fidèles[2], les parfaits se créeront des lieux à part, où la vie évangélique[3], trop haute pour le commun des hommes, puisse être pratiquée sans atténuation. Le martyre avait offert, jusque-là, le moyen de mettre en pratique les préceptes les plus exagérés du Christ, en particulier sur le mépris des affections du sang[4] ; le monastère va suppléer au martyre, pour que les conseils de Jésus soient pratiqués quelque part. L’exemple de l’Égypte, où la vie monastique avait

  1. Ὁ μονήρης βίος, dans Clém. d’Alex., Strom., VII, 12, p. 314, désigne le célibat et la vie retirée, par opposition au mariage et à la vie ordinaire. Le fait de Narcisse, Eus., H. E., VI, ix, 6, est un cas tout à fait individuel. Commodien s’appelle déjà mendicus Christi ; mais le sens de cette expression est obscur. Cf. Constit. apost., VIII, 10, οἱ ἐν ἐγκρατείᾳ καὶ εὐλαϐείᾳ, distincts des simples εὐνοῦχοι ou célibataires.
  2. Labbe, Conc., II, p. 414 et suiv.
  3. C’était ce qu’on appelait « la vie apostolique », reproduisant strictement l’idéal des Actes des apôtres.
  4. Le Blant, Comptes rendus de l’Acad. des sc. mor. et pol., 1879, 1er semestre, p. 383 et suiv.