Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/61

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philosophe ; il l’appellera pour en tirer quelque consolation, pour apprendre de lui comment on peut supporter tant de malheurs[1]. »

Ce fut surtout la conscience des souverains que les philosophes, comme plus tard les jésuites, cherchèrent à gagner au bien. « Le souverain est honnête et sage pour des milliers d’autres » ; en l’améliorant, le philosophe fait plus que s’il gagnait à la sagesse des centaines d’hommes isolément[2]. Aréus fut auprès d’Auguste un directeur, une espèce de confesseur, auquel l’empereur dévoilait toutes ses pensées et jusqu’à ses mouvements les plus secrets. Quand Livie perd son fils Drusus, c’est Aréus qui la console[3]. Sénèque joua par moments un rôle analogue auprès de Néron. Le philosophe que, du temps d’Épictète, de grossiers personnages traitent encore avec rudesse en Italie[4], devient le comes du prince, son ami le plus intime, celui qu’il reçoit à toutes les

  1. Dion Chrysostome, Orat., xxvii.
  2. Plutarque, Cum principibus philosophandum, 1 et suiv.
  3. Sénèque, Consol. ad Marciam, 4 et suiv. Cf. Suét., Oct., 89 ; Strab., XIV, v, 4 ; Dion Cass., LI, 16 ; Plutarque, Anton., 80, 81 ; Apophth., Aug., 3 ; Præc. ger. reip., 18 ; Marc-Aurèle, Pensées, VIII, 31 ; Julien, Epist. 51, ad Alex., et Cæs., p. 326, Spanh. Sénèque nous donne le discours qu’il suppose avoir été tenu par Aréus. Ses trois Consolations à Helvia, à Marcia, à Polybe, sont des morceaux du même genre.
  4. Arrien, Epict. Dissert., III, viii, 7. Cf. Perse, v, 189-191.