Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/619

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Dieu, et personne ne sera pauvre », lisons-nous dans un texte qui fut quelque temps tenu pour sacré[1]. L’église elle-même devenait un établissement de charité. Les agapes et les distributions faites du superflu des offrandes nourrissaient les pauvres, les voyageurs[2].

C’était le riche qui, sur toute la ligne, était sacrifié[3]. Il entrait peu de riches dans l’Église, et leur position y était des plus difficiles[4]. Les pauvres, fiers des promesses évangéliques, les traitaient avec un air qui pouvait sembler arrogant[5]. Le riche devait se faire pardonner sa fortune, comme une dérogation à l’esprit du christianisme. En droit, le royaume de Dieu lui était fermé[6], à moins qu’il ne purifiât sa richesse par l’aumône ou ne l’expiât par le martyre[7].

  1. Μιμήσασθε ἰσότητα θεοῦ, καὶ οὐδεὶς ἔσται πένης. Cerygma Petri et Pauli, Hilg., IV, p. 59, 65.
  2. Voir ci-dessus, p. 597.
  3. La même antipathie se remarque chez les philosophes. Lucien, Nigrinus, 12 et suiv.
  4. Tertullien, Ad ux., II, 8 ; Apol., 3, Ad nat., I, 4 ; Min. Félix, 36 ; Clém. d’Alex., Quis dives salvetur, 2 ; Actes des martyrs, voir Le Blant, Rev. arch., avril 1880, p. 234 et suiv.
  5. Clém. d’Alex., Quis dives salv., 3 ; Pseudo-Ign., ad Polyc., 4.
  6. Hermas, vis. iii, 2, 6 ; mand. ix, 3 et suiv. ; Minucius Félix, 16 ; Tertull., De pat., 7 ; saint Cyprien, De lapsis, 11 ; Orig., Contre Celse, VII, 18.
  7. Clém. d’Alex., Quis dives salv. ; Origène, Exhort. ad mart., 14, 15 ; Le Blant, Revue arch., avril 1880, p. 326-327.