Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/627

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à-dire assez durement[1]. La condition de l’esclave d’Église fut même empirée par une circonstance : savoir l’impossibilité d’aliéner le bien de l’Église. Qui était son propriétaire ? qui pouvait l’affranchir ? La difficulté de résoudre la question éternisa l’esclavage ecclésiastique et amena ce singulier résultat que l’Église, qui en réalité a tant fait pour l’esclave, a été la dernière à posséder des esclaves[2]. Les affranchissements se faisaient en général par testament ; or l’Église n’avait pas de testament à faire. L’affranchi ecclésiastique restait sous le patronat d’une maîtresse qui ne mourait pas[3].

C’est d’une façon indirecte et par voie de conséquence que le christianisme contribua puissamment à changer la situation de l’esclave et à hâter la fin de l’esclavage. Le rôle du christianisme, dans la question de l’esclavage, a été celui d’un conservateur éclairé, qui sert le radicalisme par ses principes, tout en tenant un langage très réactionnaire. En montrant

  1. Saint Grégoire le Grand, Epist., IX, 102 ; X, 3, 66 ; XI, 23 ; XII, 25, 36, 46.
  2. Concile d’Épone, serfs de saint Claude.
  3. Liberti Ecclesiæ, quia nunquam moritur eorum patrona, a patrocinio ejus nunquam discedant. 4e conc. de Tolède (en 633), can. 68, 70, 74 ; 4e conc. d’Orl. (en 541), can. 9 ; Décret, 1ª pars, dist. liv ; 2ª pars, causa xii, quæst. 2, ch. lv et suiv. Voir Revue crit., 26 avril 1880, p. 332.