Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/110

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espérer retrouver des parties anciennes recouvertes, je serais bien d’avis qu’on les enlevât ; mais la disparition de ces enfantillages ne nous rendra pas un atome de ce qui est perdu. Laissez donc ce petit monument tel qu’il est. Et puis le goût est si changeant ! Qui peut se vanter de le fixer ? Le xviie siècle sabrait le moyen âge, sans se douter qu’un jour cet art barbare, incorrect, souvent sauvage, aurait son prix. On détruit maintenant le xviie siècle comme fade et sans caractère. Qui sait quel sera le goût de l’avenir, et si le xixe siècle ne sera pas traité de vandale à son tour ? Il n’y a qu’une manière sûre pour n’être pas traité de vandale : c’est de ne rien détruire, c’est de laisser les monuments du passé tels qu’ils sont. L’Italie, avec ses contrastes éloquents ou bizarres nous paraît si belle comme elle est, que nous ne voyons pas sans crainte porter la main sur une partie quelconque de ce décor merveilleux, même sur les parties mauvaises, même sur le rococo.

La Ziza et la Couba furent longtemps tenues pour des constructions de l’époque arabe. La similitude est parfaite, et on raconte qu’Abd-el-Kader, ayant visité ces charmants édifices, se prit à pleurer au souvenir des déchéances de sa race. Les inscriptions arabes, visibles encore, quoique mutilées, et commençant par la formule : « Au nom de Dieu, clément et miséricordieux, » n’étaient-elles par la meilleure des preuves ? Le premier, M. Amari a lu ces inscriptions en entier, et que disent-elles ? Que Guillaume Ier et Guillaume II ont élevé ces châteaux pour leur habitation et leurs plaisirs. Ici donc encore les Arabes travaillèrent pour les Normands. Les architectes firent connue Edrisi, qui écrivit en arabe pour