Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/238

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de renouer la tradition interrompue depuis près de quatre cents ans. Ici de cruelles déceptions l’attendaient. Les systèmes d’esthétique, toujours vrais en un sens, quand ils sont conçus par des esprits élevés, ne doivent jamais chercher à se réaliser. Les seuls chefs-d’œuvre que produisit l’école néo-gothique sont de très-bons livres d’archéologie. L’impuissance des idées théoriques à rien créer en fait d’art, le rang secondaire fatalement assigné à tout ce qui est pastiche et imitation furent prouvés par un exemple de plus ; mais la meilleure série de travaux que la France ait produite en notre siècle sortit de cette direction, ou, si l’on veut, de cette mode. Inférieur à l’Allemagne pour les ouvrages de haute critique et de très-fine analyse, notre pays prit sa revanche en ces travaux d’une méthode exacte et sobre, où les qualités du savant et celles de l’homme de goût se retrouvent dans une juste proportion. Grâce au travail de ces trente dernières années et à l’accord des résultats obtenus, les principaux problèmes relatifs à l’art du moyen âge ont reçu une solution qu’on peut dire assurée.


I.

Comment cet art naquit-il ? Au milieu de quelle société réussit-il à grandir ? Comment cette société ne suffit-elle pas pour l’amener à sa perfection ? Comment la grande génération qui créa le style gothique n’eut-elle pas pour élèves des artistes analogues à ceux de l’Italie du xvie siècle ?