Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/266

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rable. De même il faut reconnaître que cette dynastie des Valois, à laquelle l’historien politique est en droit d’adresser de si sévères reproches, créa le côté brillant de la civilisation française, et contribua puissamment à fonder la suprématie en fait d’élégance et de goût qui ne devait plus nous être enlevée. À partir de Philippe de Valois, la cour de France est le centre le plus distingué du monde. Les fêtes, les tournois, les mœurs chevaleresques et polies y attirent le monde entier. Trois ou quatre rois, les rois de Bohême, de Navarre, de Majorque, d’Écosse, une foule de princes à peu près étrangers à la France, y faisaient leur résidence habituelle. Paris réglait la mode et attirait les regards de l’Europe entière, Philippe de Valois et son fils Jean apparaissaient en quelque sorte à l’imagination de leurs contemporains comme des rois de chanson de geste, passant leur vie en guerres et en fêtes, dans un cercle continu d’actions brillantes et de spectacles. Mais l’art véritable ne va pas sans une solide culture du jugement ; de joyeuses folies ne suffisent pas pour produire des œuvres durables et un mouvement vraiment fécond.

L’idéal sembla être atteint quand le hasard porta au trône celui des fils du roi Jean qui joignait aux goûts libéraux de son père et de ses frères un sérieux et un jugement qu’ils n’avaient pas. Artiste lui-même, architecte, mécanicien, entouré de ses habiles compères Raymond du Temple, Jean-Saint-Romain, Charles V donna la mesure de ce que peut une dynastie amie des arts en un siècle dénué de génie. Toutes les histoires italiennes n’ont rien à comparer, pour la droiture et le bon sens, à ce prince, le plus accompli de tout le moyen