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MÉLANGES D’HISTOIRE.

didats s’occupaient de pure littérature au lieu d’étudier les principes de la morale et de l’administration. « On doit se souvenir, dit-il, qu’en subventionnant les lettrés, l’État n’a pas pour but d’exciter le talent littéraire, qui est inutile, mais d’inspirer au peuple le respect qu’il doit aux princes et aux ancêtres. » Ce fut par un motif semblable que Kia-King, le prédécesseur de l’empereur actuel, refusa en 1800 d’autoriser l’établissement de collèges et de concours littéraires dans les provinces de Tartarie, parce que, dit-il dans son rescrit, ces provinces doivent avant tout conserver les habitudes et l’esprit militaires.

L’obtention des grades littéraires et l’admission aux fonctions publiques, ou, comme l’on dit, au titre de « membre du gouvernement », étant devenues le but unique de l’éducation, on a vu naître tous les abus qui se produisent chaque fois que l’on substitue dans la culture intellectuelle une fin trop pratique à la recherche désintéressée de la science. Ainsi l’usage exclusif des manuels, la préparation mécanique et dirigée uniquement en vue du concours, sont, à ce qu’il paraît, le défaut des bacheliers en Chine comme dans bien d’autres pays. En outre, l’âge des candidats n’étant pas limité, ceux-ci continuent indéfiniment à se présenter, et souvent ils réussissent à un âge trop avancé pour remplir convenablement les fonctions qui exigent de l’activité. C’est ce qui sert au moins de prétexte pour tolérer le rachat pécuniaire des examens, et ce qui amène souvent les magistrats à compenser par leurs exactions, dans l’exercice de leur charge, les dépenses qu’ils ont dû faire pour l’obtenir.