Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/547

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA LIBERTÉ DE L ENSEIGNEMENT. 521

inscription dans les caisses de l’État, il faut que l’élève paye directement son professeur, soit ordinaire, soit libre. Il en résultera pour le professeur ordinaire un supplément bien légitime à des traitements devenus tout à fait insuffisants, et pour le professeur libre une entrée de carrière modeste ou brillante en proportion de ses succès.

La main sur la conscience, quel est l’ami le plus timoré de la liberté qui puisse dire que, dans un tel système, tout le monde n’est pas parfaitement libre ? Prenons l’opinion la plus susceptible, celle qui s’imagine le plus volontiers être lésée dans ses droits, l’opinion catholique ; de quoi peut-elle se plaindre ? D’abord, dans l’obtention des chaires ordinaires, rétribuées par l’État, personne ne sera exclu apparemment parce qu’il est catholique. Nous avons vu plus d’une carrière gênée faute d’une orthodoxie suffisante ; nous n’en avons vu aucune à laquelle l’orthodoxie du sujet ait été un obstacle. Mais supposons que les pasteurs catholiques trouvent que dans une Faculté les opinions contraires aux leurs ont trop le dessus, que les leurs ne sont pas suffisamment représentées, le remède est bien simple : qu’ils lancent comme professeurs libres dans le sein de ladite Faculté deux ou trois jeunes docteurs, défenseurs des idées orthodoxes. Les élèves auront parfaitement le droit d’aller à leurs cours et même de n’aller qu’à ces cours, puisqu’au jour de l’examen on ne demande aucun compte à l’élève des professeurs qu’il a entendus. Un tel système ne vaudrait-il pas beaucoup mieux que des cours d’apologétique chrétienne à huis clos dans des Facultés fermées ? Je suppose, de nos jours, dans le parti catholique, un homme du mérite d’Ozanam. Est-ce qu’il n’aimerait pas bien mieux professer à la