Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/184

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ami, que d’avoir fait cet essai, d’avoir franchi ce premier pas, ce début. Dis-moi si tu as pu continuer à n’en avoir aucun désagrément, car il n’y a plus ni ordre ni discipline en rien. — je ne réponds point, mon ami, à l’idée de pension dont tu me parlais dans ton avant-dernière lettre, parce que tu t’y arrêtes peu toi-même, et que j’ai encore besoin d’espérer qu’il n’en faudra pas en venir à une extrémité si douloureuse. Ces mots te diront, mon ami, qu’il faudrait encore bien des malheurs pour me gagner à un pareil projet, malheurs généraux, destruction complète de toutes mes espérances pour toi ; cependant je ne le repousse pas complètement, car aujourd’hui on ne peut se permettre de rien repousser. — Adieu, mon bon Ernest, adieu ! À toi en tout et toujours.

H. R.


MADEMOISELLE RENAN
chez monsieur le comte André Zamoyski, Nouveau-Monde, Varsovie, Pologne.


Paris, 9 mai 1848.

Que je le remercie, chère Henriette, de ton assiduité à m’écrire, dans ce moment de cruelle perplexité. Sans me rassurer complètement (car qui peut ne rien craindre dans les jours que nous traversons), elles adoucissent au moins mes inquiétudes, et calment mes alarmes présentes. J’ai toujours pensé, chère amie, que les journaux de