Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/200

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environs du Panthéon et de la rue Saint-Jacques soient la centre de l'émeute, un crains rien, chère Henriette. La propriété privée est scrupuleusement respectée.

Du reste, en en moment, tout semble assoupi, et il n’est pas douteux que la force ne reste au gouvernement établi. On devait le désirer, et pour ma part, alors même que l'insurrection semblait triomphante, je n’en ai jamais douté. Le nombre des morts et des blessés est incalculable. Je ne puis t'en dire davantage, chère amie, je profite d’une éclaircie, pour aller jeter cette lettre à la poste, n’espérant pas toutefois qu’elle puisse partir aujourd'hui. Je l’écrirai quand nous aurons un résultat. A toi tout entier, ma soeur bien-aimée. Ah ! que j’ai besoin de songer à toi dans ces tristes moments.

Ton frère et ami,

E. RENAN.


26 juin

Il m’a été impossible, chère amie, de mettre hier ma lettre à la poste. A peine avais-je fait quelques pas que j’ai entendu la fusillade recommencer tout près d’ici. D’ailleurs toute communication était interceptée entre ce quartier et le reste de la ville et les postes n’y fonctionnaient pas. La soirée et la nuit dernières ont été plus terribles que jamais ; il y a eu un massacre à la