Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/466

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que ta mission t’obligerait à retourner a Paris, tu viendrais ensuite à Berlin. Le comte me fera conduire chez sa fille mariée, le mari de cette dernière m’accompagnera à Berlin, et s’il t’est possible, mon bien-aimé, de venir on cette ville, je ne ferai plus un pas sans appui.

12 avril. — Un petit mieux, mon Ernest, mais un mieux marqué dans ma malheureuse gorge. Mon docteur a été content ce matin de l’état ou il l’a trouvée. Je suis loin d’être bien, mais rattachons-nous à l’espérance. O mon frère, ô ma chère âme, ô mon plus doux lien ici-bas, sois courageux quoi qu’il m’arrive, mais crois bien surtout que c’est pour toi que je me rattache à la vie. — je t’assure, mon Ernest, que je suis mieux ; je ne puis pas encore parler, ou du moins je ne parle que peu, mais je n’ai plus dans la gorge les déchirements continuels que j’y ressentais. Achève ta mission, cher ami, et tâche d’être à Berlin au commencement ou dans le courant de juin. Il me semble que près de toi, sous un chaud rayon de soleil, je reviendrai encore à l’existence. Le médecin qui me traite ne pense pas que je doive passer l’hiver prochain même à Paris, il serait d’avis que j’allasse dans le midi de la France ; mais nous en parlerons plus tard. Si je ne puis pas envoyer à M. Daremberg les cinq cents francs dont je te parle, j’espère, cher ami, que tu pourras faire venir cette somme de Saint-Malo ; j’aurai à Berlin tout ce qu’il nous faudra pour aller jusqu’à Paris. Te revoir, mon Ernest, voyager avec toi ! ah !