Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/125

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dire la condition essentielle de la morale et de la religion. La foi de l’humanité cependant ne pouvait venir de là, parce que ces vieux cultes avaient beaucoup de peine à se détacher du polythéisme et n’aboutissaient pas à un symbole bien clair. Le brahmanisme n’a vécu jusqu’à nos jours que grâce au privilège étonnant de conservation que l’Inde semble posséder. Le bouddhisme échoua dans toutes ses tentatives vers l’ouest. Le druidisme resta une forme exclusivement nationale et sans portée universelle. Les tentatives grecques de réforme, l’orphisme, les mystères, ne suffirent pas pour donner aux âmes un aliment solide. La Perse seule arriva à se faire une religion dogmatique, presque monothéiste et savamment organisée ; mais il est fort possible que cette organisation même fût une imitation ou un emprunt. En tout cas, la Perse n’a pas converti le monde ; elle s’est convertie, au contraire, quand elle a vu paraître sur ses frontières le drapeau de l’unité divine proclamée par l’islam.

C’est la race sémitique[1] qui a la gloire d’avoir fait

  1. Je rappelle que ce mot désigne simplement ici les peuples qui parlent ou ont parlé une des langues qu’on appelle sémitiques. Une telle désignation est tout à fait défectueuse ; mais c’est un de ces mots, comme « architecture gothique », « chiffres arabes », qu’il faut conserver pour s’entendre, même après qu’on a démontré l’erreur qu’ils impliquent.