Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/134

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pas encore ; par une étrange contradiction, ces convertis (prosélytes) étaient peu considérés et traités avec dédain[1]. Mais l’idée d’une religion exclusive, l’idée qu’il y a au monde quelque chose de supérieur à la patrie, au sang, aux lois, l’idée qui fera les apôtres et les martyrs, était fondée. Une profonde pitié pour les païens, quelque brillante que soit leur fortune mondaine, est désormais le sentiment de tout juif[2]. Par une série de légendes, destinées à fournir des modèles d’inébranlable fermeté (Daniel et ses compagnons, la mère des Macchabées et ses sept fils[3], le roman de l’hippodrome d’Alexandrie[4]), les guides du peuple cherchent surtout à inculquer cette idée que la vertu consiste dans un attachement fanatique à des institutions religieuses déterminées.

Les persécutions d’Antiochus Épiphane firent de cette idée une passion, presque une frénésie. Ce fut

  1. Mischna, Schebiit, x, 9 ; Talmud de Babylone, Niddah, fol. 13 b ; Jebamoth, 47 b ; Kidduschin, 70 b ; Midrasch, Jalkut Ruth, fol. 163 d.
  2. Lettre apocr. de Baruch, dans Fabricius, Cod. pseud. V. T., II, 147 et suiv., et dans Ceriani, Monum. sacra et prof., I, fasc. ii, p. 96 et suiv.
  3. IIe livre des Macchabées, ch. vii, et le De Maccabæis, attribué à Josèphe. Cf. Épitre aux Hébreux, xi, 33 et suiv.
  4. IIIe livre (apocr.) des Macchabées ; Rufin, Suppl. ad. Jos., Contra Apionem, II, 5.