Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/175

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tiochus. Il n’y avait qu’un rhéteur, habitué à répéter de vieilles phrases dénuées de sens, pour oser prétendre que ces malheurs venaient des infidélités du peuple[1]. Quoi ! ces victimes qui meurent pour leur foi, ces héroïques Macchabées, cette mère avec ses sept fils, Jéhovah les oubliera éternellement, les abandonnera à la pourriture de la fosse[2] ? Un sadducéen incrédule et mondain pouvait bien ne pas reculer devant une telle conséquence ; un sage consommé, tel qu’Antigone de Soco[3] pouvait bien soutenir qu’il ne faut pas pratiquer la vertu comme l’esclave en vue de la récompense, qu’il faut être vertueux sans espoir. Mais la masse de la nation ne pouvait se contenter de cela. Les uns, se rattachant au principe de l’immortalité philosophique, se représentèrent les justes vivant dans la mémoire de Dieu, glorieux à jamais dans le souvenir des hommes, jugeant l’impie qui les a persécutés[4]. « Ils vivent aux yeux de Dieu ;... ils

  1. Esth., xiv, 6-7 (apocr.) ; Épître apocryphe de Baruch (Fabricius et Ceriani, loc. cit.).
  2. II Macch., vii.
  3. Pirké Aboth, i, 3.
  4. Sagesse, ch. ii-vi ; viii, 13 ; Pirké Aboth, iv, 16 ; De rationis imperio, attribué à Josèphe, 8, 13, 16, 18. Encore faut-il remarquer que l’auteur de ce dernier traité ne fait valoir qu’en seconde ligne le motif de rémunération personnelle. Le principal mobile des martyrs est l’amour pur de la Loi, l’avantage que leur mort