Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/210

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ments du cœur, sur l’imitation de Dieu[1], sur le rapport immédiat de la conscience avec le Père céleste, étaient la suite de ces principes. Jésus ne recula jamais devant cette hardie conséquence, qui faisait de lui, dans le sein du judaïsme, un révolutionnaire au premier chef. Pourquoi des intermédiaires entre l’homme et son Père ? Dieu ne voyant que le cœur, à quoi bon ces purifications, ces pratiques qui n’atteignent que le corps[2] ? La tradition même, chose si sainte pour le juif, n’est rien, comparée au sentiment pur[3]. L’hypocrisie des pharisiens, qui en priant tournaient la tête pour voir si on les regardait, qui faisaient leurs aumônes avec fracas, et mettaient sur leurs habits des signes qui les faisaient reconnaître pour personnes pieuses, toutes ces simagrées de la fausse dévotion le révoltaient. « Ils ont reçu leur récompense, disait-il ; pour toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite, afin que ton aumône reste dans le secret, et alors ton Père, qui voit dans le secret, te la rendra[4]. Et, quand tu pries, n’imite pas les hypo-

  1. Comparez Philon, De migr. Abr., § 23 et 24 ; De vita contemplativa, en entier.
  2. Matth., xv, 11 et suiv. ; Marc, vii, 6 et suiv.
  3. Marc, vii, 6 et suiv.
  4. Matth. vi, 1 et suiv. Comparez Ecclésiastique, xvii, 18 ;