Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/227

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à la racine de l’arbre, que l’arbre serait bientôt jeté au feu. Il représentait son Messie un van à la main, recueillant le bon grain et brûlant la paille. La pénitence, dont le baptême était la figure, l’aumône, l’amendement des mœurs[1], étaient pour Jean les grands moyens de préparation aux événements prochains. On ne sait pas exactement sous quel jour il concevait ces événements. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il prêchait avec beaucoup de force contre les adversaires mêmes que Jésus attaqua plus tard, contre les prêtres riches, les pharisiens, les docteurs, le judaïsme officiel en un mot, et que, comme Jésus, il était surtout accueilli par les classes méprisées[2]. Il réduisait à rien le titre de fils d’Abraham, et disait que Dieu pourrait faire des fils d’Abraham avec les pierres du chemin[3]. Il ne semble pas qu’il possédât même en germe la grande idée qui a fait le triomphe de Jésus, l’idée d’une religion pure ; mais il servait puissamment cette idée en substituant un rite privé aux cérémonies légales, pour lesquelles il fallait des prêtres, à peu près comme les flagellants du moyen âge ont été des précurseurs de la Réforme, en enlevant le monopole des sacrements et de l’absolution

  1. Luc, iii, 11-14 ; Josèphe, Ant., XVIII, v, 2.
  2. Matth., xxi, 32 : Luc, iii, 12-14.
  3. Matth., iii, 9.