Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/264

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parole aussi accommodée à leur imagination riante[1]. On l’admirait, on le choyait, on trouvait qu’il parlait bien et que ses raisons étaient convaincantes. Les objections les plus difficiles, il les résolvait avec assurance ; le rhythme presque poétique de ses discours captivait ces populations encore jeunes, que le pédantisme des docteurs n’avait pas desséchées.

L’autorité du jeune maître allait ainsi tous les jours grandissant, et, naturellement, plus on croyait en lui, plus il croyait en lui-même. Son action était fort restreinte. Elle était toute bornée au bassin du lac de Tibériade, et même dans ce bassin, elle avait une région préférée. Le lac a cinq ou six lieues de long sur trois ou quatre de large ; quoique offrant l’apparence d’un ovale assez régulier, il forme, à partir de Tibériade jusqu’à l’entrée du Jourdain, une sorte de golfe, dont la courbe mesure environ trois lieues. Voilà le champ où la semence de Jésus trouva enfin la terre bien préparée. Parcourons-le pas à pas, en essayant de soulever le manteau de sécheresse et de deuil dont l’a couvert le démon de l’islam.

En sortant de Tibériade, ce sont d’abord des rochers escarpés, une montagne qui semble s’écrouler dans la mer. Puis les montagnes s’écartent ; une

  1. Matth., vii, 28 ; xiii, 54 ; Marc, i, 22 ; vi, 1 ; Luc, iv, 22, 32.