Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/301

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de ce régime ne tardèrent pas à se faire sentir. Il fallait un trésorier. On choisit pour cela Juda de Kerioth. À tort ou à raison, on l’accusa de voler la caisse commune[1] ; un poids énorme d’antipathies s’amoncela contre lui.

Quelquefois, le maître, plus versé dans les choses du ciel que dans celles de la terre, enseignait une économie politique plus singulière encore. Dans une parabole bizarre, un intendant est loué pour s’être fait des amis parmi les pauvres aux dépens de son maître, afin que les pauvres à leur tour l’introduisent dans le royaume du ciel. Les pauvres, en effet, devant être les dispensateurs de ce royaume, n’y recevront que ceux qui leur auront donné. Un homme avisé songeant à l’avenir doit donc chercher à les gagner. « Les pharisiens, qui étaient des avares, dit l’évangéliste, entendaient cela, et se moquaient de lui[2]. » Entendirent-ils aussi la redoutable parabole que voici ? « Il y avait un homme riche, qui était vêtu de pourpre et de fin lin, et qui tous les jours faisait bonne chère. Il y avait aussi un pauvre, nommé Lazare, qui était couché à sa porte, couvert d’ulcères, désireux de se rassasier des miettes qui

  1. Jean, xii, 6.
  2. Luc, xvi, 1-14.