Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/361

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deux jours[1]. Dans une circonstance, il ne rencontre de gratitude et de vraie piété que chez un Samaritain[2]. Une de ses plus belles paraboles est celle de l’homme blessé sur la route de Jéricho. Un prêtre passe, le voit et continue son chemin. Un lévite passe et ne s’arrête pas. Un Samaritain a pitié de lui, s’approche, verse de l’huile dans ses plaies et les bande[3]. Jésus conclut de là que la vraie fraternité s’établit entre les hommes par la charité, non par la foi religieuse. Le « prochain », qui dans le judaïsme était surtout le coreligionnaire[4], est pour lui l’homme qui a pitié de son semblable sans distinction de secte. La fraternité humaine dans le sens le plus large sortait à pleins bords de tous ses enseignements.

Ces pensées, qui assiégeaient Jésus à sa sortie de Jérusalem, trouvèrent leur vive expression dans une

  1. Jean, iv, 39-43. Ce qui laisse planer quelque doute sur tout ceci, c’est que Luc et l’auteur du quatrième Évangile, qui tous deux sont antijudaïsants et aspirent à montrer que Jésus fut favorable aux païens, parlent seuls de ces rapports de Jésus avec les Samaritains, et sont en contradiction sur ce point avec Matthieu (x, 5).
  2. Luc, xvii, 16 et suiv.
  3. Ibid., x, 30 et suiv.
  4. Le passage Lévit., xix, 18, 33 et suiv., est d’un sentiment bien plus large ; mais le cercle de la fraternité juive s’était resserré de plus en plus. Voir le dictionnaire Aruch, au mot בן ברית.