Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/386

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C’étaient le plus souvent des circonstances fortuites ou insignifiantes de la vie du maître qui rappelaient aux disciples certains passages des Psaumes et des Prophètes, où, par suite de leur constante préoccupation, ils voyaient des images de ce qui se passait sous leurs yeux[1]. L’exégèse du temps consistait ainsi presque toute en jeux de mots, en citations amenées d’une façon artificielle et arbitraire[2]. La synagogue n’avait pas une liste officiellement arrêtée des passages qui se rapportaient au règne futur. Les applications messianiques étaient libres, et constituaient des artifices de style bien plutôt qu’une sérieuse argumentation.

Quant aux miracles, on les tenait, à cette époque, pour la marque indispensable du divin et pour le signe des vocations prophétiques. Les légendes d’Élie et d’Élisée en étaient pleines. Il était reçu que le Messie en ferait beaucoup[3]. À quelques lieues de Jésus, à Samarie, un magicien nommé Simon se créait par ses prestiges un rôle presque divin[4]. Plus tard, quand on voulut fonder la vogue d’Apollonius de

  1. Matth., i, 23 ; iv, 6, 14 ; xxvi, 31, 54, 56 ; xxvii, 9, 35 ; Marc, xiv, 27 ; xv, 28 ; Jean, xii, 14-15 ; xviii, 9 ; xix, 19, 24, 28, 36.
  2. C’est ce qu’on remarque presque à chaque page du Talmud.
  3. Jean, vii, 34 ; IV Esdras, xiii, 50.
  4. Act., viii, 9 et suiv.