Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/625

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même. Toutes les circonstances de la résurrection de Lazare pourraient être le fruit de l’imagination du narrateur, il serait prouvé que toutes ces circonstances ont été combinées en vue de l’effet, selon la constante habitude que nous avons remarquée chez notre écrivain, que le fait principal n’en resterait pas moins exceptionnel dans l’histoire évangélique. Le miracle de Béthanie est aux miracles galiléens ce que les stigmates de François d’Assise sont aux autres miracles du même saint. M. Karl Hase a composé une vie exquise du christ ombrien sans insister en particulier sur aucun de ces derniers ; mais il a bien vu qu’il n’eût pas été biographe sincère s’il ne se fût appesanti sur les stigmates ; il y consacre un long chapitre, laissant place à toute sorte de conjectures et de suppositions.

Parmi les miracles dont les quatre rédactions de la vie de Jésus sont semées, une distinction se fait d’elle-même. Les uns sont purement et simplement des créations de la légende. Rien dans la vie réelle de Jésus n’y a donné lieu. Ils sont le fruit de ce travail d’imagination qui se produit autour de toutes les renommées populaires. D’autres ont eu pour cause des faits réels. Ce n’est pas arbitrairement que la légende a prêté à Jésus des guérisons de possédés. Sans nul doute, plus d’une fois, Jésus crut opérer de telles cures. La multiplication des pains, plusieurs guérisons de maladies, peut-être certaines apparitions, doivent être mises dans la même catégorie. Ce ne sont pas là des miracles éclos de la pure imagination ; ce sont des miracles conçus à propos d’incidents réels grossis ou transfigurés. Écartons absolument une idée fort répandue, d’après laquelle un témoin oculaire ne rapporte pas de miracles. L’auteur des derniers chapitres des Actes est sûrement un témoin oculaire de la vie de saint Paul ; or, cet auteur raconte des miracles qui ont dû