Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/628

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revient toujours à ce point fondamental. Il s’agit de savoir lequel des deux systèmes est le vrai, de celui qui fait de la Galilée le théâtre de toute l’activité de Jésus, ou de celui qui fait passer à Jésus une partie de sa vie à Jérusalem.

Je n’ignore pas les efforts que fait ici l’explication symbolique. Le miracle de Béthanie signifie, d’après les doctes si profonds défenseurs de ce système, que Jésus est pour les croyants la résurrection et la vie au sens spirituel. Lazare est le pauvre, l’ébion ressuscité par le Christ de son état de mort spirituelle. C’est pour cela, c’est à la vue d’un réveil populaire qui devient inquiétant pour elles, que les classes officielles se décident à faire périr Jésus. Voilà le système dans lequel se reposent les meilleurs théologiens que l’Église chrétienne possède en notre siècle. Il est selon moi erroné. Notre Évangile est dogmatique, je le reconnais, mais il n’est nullement allégorique. Les écrits vraiment allégoriques des premiers siècles, l’Apocalypse, le Pasteur d’Hermas, la Pisté Sophia, ont une bien autre allure. Au fond, tout ce symbolisme est le pendant du mythisme de M. Strauss : expédients de théologiens aux abois, se sauvant par l’allégorie, le mythe, le symbole. Pour nous, qui ne cherchons que la pure vérité historique sans une ombre d’arrière-pensée théologique ou politique, nous devons être plus libres. Pour nous, tout cela n’est pas mythique, tout cela n’est pas symbolique ; tout cela est de l’histoire sectaire et populaire. Il y faut porter de grandes défiances, mais non un parti pris de commodes explications.

On allègue divers exemples. L’école alexandrine, telle que nous la connaissons par les écrits de Philon, exerça sans contredit une forte influence sur la théologie du siècle apostolique. Or, ne voyons-nous pas cette école pousser le goût du symbolisme jusqu’à la folie ? Tout l’Ancien Testa-