Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/656

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ailleurs[1] la supériorité de ce système. Il suffit pour le moment de rappeler qu’il répond bien mieux au passage capital de saint Paul, I Cor., xv, 5-8.


Que résulte-t-il de cette longue analyse ? 1o Que, considéré en lui-même, le récit des circonstances matérielles de la vie de Jésus, comme le fournit le quatrième Évangile, est supérieur pour la vraisemblance au récit des synoptiques ; 2o qu’au contraire les discours que le quatrième évangéliste prête à Jésus n’ont, en général, aucun caractère d’authenticité ; 3o que l’auteur a sur la vie de Jésus une tradition à lui, très-différente de celle des synoptiques, sauf en ce qui concerne les derniers jours ; 4o que cette tradition cependant fut assez répandue, car Luc, qui n’est pas de l’école d’où sort notre Évangile, a une idée plus ou moins vague de plusieurs des faits que notre auteur connaît et que Matthieu et Marc ignorent ; 5o que l’ouvrage est moins beau que les Évangiles synoptiques, Matthieu et Marc étant des chefs-d’œuvre d’art spontané, Luc offrant une combinaison admirable d’art naïf et de réflexion, tandis que le quatrième Évangile n’offre qu’une série de notes très-mal agencées, où la légende et la tradition, la réflexion et la naïveté se fondent mal ; 6o que l’auteur du quatrième Évangile, quel qu’il soit, a écrit pour relever l’autorité d’un des apôtres, pour montrer que cet apôtre avait joué un rôle dans des circonstances où les autres récits ne parlaient pas de lui, pour prouver qu’il savait des choses que les autres disciples ne savaient pas ; 7o que l’auteur du quatrième Évangile a écrit dans un état du christianisme plus avancé que les synoptiques, et avec une idée plus exaltée du rôle divin

  1. Les Apôtres, ch. i-iii.