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BUCOLIQUES


avait enfilé, cette nuit, une perle de rosée, chacun de nos pas brisait un collier.

Les vernes penchés sur la rivière prenaient quelques gouttes d’eau au creux des feuilles de leurs plus basses branches et semblaient faire un brin de toilette.

Une laveuse était déjà agenouillée et se frappait à grands coups comme une pécheresse qui a passé la nuit dehors.

Des goujons qui jouaient presque à sec, dans le sable, se sauvèrent à notre approche, sans plus laisser de marques à l’eau douce que les étoiles filantes au ciel.

Las de regarder toujours la même chose, nous prîmes une ruelle qui remonte au village. C’est un sentier mal entretenu par ses propriétaires riverains négligents. On ne peut y rouler une brouette sans se piquer les doigts aux orties.

Soudain notre rêverie fut troublée par un éclat de voix. Nous levâmes la tête, et nous aperçûmes, devant nous, à l’autre bout du sentier, la vieille Martenette qui criait : « Huche ! huche ! » et qui agitait