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L’HOMME ASSIS SUR UN MUR


Le châtelain du village étant mort, il faut que la commune de Cervol se choisisse un autre maire. Elle n’hésite pas et ses conseillers font des avances immédiates au plus instruit d’entre eux, à l’homme assis sur un mur. On appelle ainsi M. Castel parce que chaque jour, dès la chaleur, il s’assied sur son mur. Les bras croisés et les jambes pendantes, il domine le village. Il est presque aussi haut que le clocher. Il porte une blouse et des sabots comme un paysan, une chaîne d’or et du linge net comme un homme qui ne travaille plus. Il ne fait que fumer, et, du matin à la nuit, les cigarettes brûlent à ses lèvres, s’éteignent et tombent, sans qu’il y touche. Il vit à l’écart ; il allait le moins possible aux séances du conseil ; il parle si rarement qu’on le connaît peu ; mais nul ne doute de son honnêteté.

Et, surtout, on le croit très capable : capable de quoi ? C’est le mystère.

— J’accepte, dit il au conseil municipal, et je vous dispense de me remercier.

Or, à peine élu, M. Castel doit célébrer un mariage. Pierre Coquin épouse Louise Fré.

Conformément à la loi, le nouveau maire, ceint