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POURPRE CARDINALICE


Éloi, qui est un souscripteur professionnel, reçoit son exemplaire du Latin mystique, par M. Rémy de Gourmont. Il l’a demandé sur japon pourpre cardinalice. Il rouvre et brusquement ferme les paupières, comme s’il avait levé le couvercle d’un poêle.

— Je m’y prends mal, dit-il.

Il risque un œil, avec précaution, puis l’autre du côté de l’incendie.

— Que c’est beau ! mais je n’y vois que du feu.

En vain il tâche, imitant les balancés d’un cavalier seul, de se mettre au point. Il lui faudrait un système compliqué de poulies et de ficelles. Il sonne son domestique et lui pose le livre sur la poitrine.

— Jean, dit-il, reculez pas à pas, doucement, moins vite encore ! là ! bien. Halte ! que personne ne bouge !

Il fait jouer des rideaux et organise la lumière favorable.

Jean, raide, bombé, supporte le précieux fardeau et détourne un peu la tête, car d’ordinaire la chaleur l’incommode.