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LA GLOIRE DU COMACCHIO

— « D’accord. Mais si vous l’aviez brisée, à présent vous seriez arrêté. Il y avait trop de gens sur la galerie. »

— « Alors, cette nuit, n’est-ce pas ? Dis ? Veux-tu, cette nuit ?… »

— « Cette nuit ? Vous n’y songez pas ! Ils vont festoyer jusqu’au matin. »

— « Tubal ! Tubal ! Pourquoi m’as-tu prévenu si tard ! »

— « Je ne savais pas. Non, sur l’honneur, aussi vrai que nous voilà tous les deux, par la tête de mon père, je ne savais rien du tout, rien du tout… — Vous vous rattraperez une autre fois, Messer. »

— « Non », riposta Cesare. Et son accent devint grave et profond : « Je suis trop vieux. La gloire est jouvencelle, comme Chiarina. Il leur faut de jeunes amants. Ce concours, c’était mon va-tout. J’ai joué ; j’ai perdu. Mon Andromède : chant du cygne ! fleur d’aloès ! L’ayant créée, je n’ai plus qu’à mourir… » Sa voix tremblait. « Et ce n’est que du plâtre éphémère ! À peine me survivra-t-elle. La postérité ne pourra lui faire justice… Pas de gloire, Cesare Bordone !…