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Page:Renee-dunan-entre-deux-caresses-1927.djvu/213

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ENTRE DEUX CARESSES

Georges croyait percevoir avec netteté le ménisque convexe de la masse marine.

Peuplée à l’aube de barques de pêche la mer se vida bientôt. On croisa un voilier de course aux lignes fuyantes qui portait une toile démesurée. Il sectionnait d’une étrave aiguë les croupes liquoreuses. On vit aussi un cargo à coque de fer dont le boulonnage serré faisait songer à une bête pustuleuse.

Le soleil devint de plomb et la fraîcheur s’accentua. Les horizons se rapprochaient lentement. Au nord une tache couleur de caramel semblait faire fermenter le ciel et la mer.

Le système des vagues prit une sorte de dérive angulaire. Georges pensa. Nous arrivons au Golfe Gascon.

Le temps passa. On allait toujours vite, mais l’eau changeait de nuance. On eut dit un fleuve de pus. Des coups d’air verticaux donnaient parfois du bélier sur l’incompressible bloc liquide. L’eau écrasée faisait ressort et s’élevait éperdument. Bientôt la mer fut noirâtre et baveuse. Des mouvements énormes venant du large se succédaient et leur battement apparaissait étrangement destructeur.

Le soleil s’éteignit. Une buée glaciale s’épandait. Des appels d’air sans direction secouaient l’atmosphère. Au ciel, à diverses hauteurs, les nuages suivaient des directions contrariées. Il y avait du danger. Les deux basques obliquèrent