Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/17

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pouvons cependant croire en être indépendant pour sa propre existence.

L’idée de l’objet extérieur est certaine, comme étant elle-même une donnée empirique ; et elle est vraie, comme croyance de laquelle il est impossible à notre conscience de se détacher. On la nommerait à juste titre notion de l’altérité pour la distinguer de celle de l’extériorité, ou intuition spatiale, qui n’en est qu’une forme sensible.

En conséquence de cette notion et de ses applications à la connaissance des phénomènes, certains objets de la conscience deviennent, à son jugement, des êtres réels, c’est-à-dire des sujets pour soi, qui ont leurs attributs, leurs fonctions, et soutiennent des relations entre eux sous lesquelles ils ont à être considérés et étudiés, en dehors de celles de leurs relations qui les rendent des objets pour nous.

Les premiers de ces sujets pour soi sont naturellement ceux qui, d’après l’expérience, nous sont entièrement ou en partie comparables. La nature des autres, leurs propriétés générales, leur composition, sont à étudier, en psychologie d’abord, parce qu’ils sont en nous des représentations, et puis par diverses méthodes. Nous les considérons toujours comme des sujets, et non pas simplement comme des objets à nous, par ce seul fait que, leur reconnaissant l’altérité et une suffisante distinction les uns des autres, nous les définissons par des qualités déterminées dont ils sont des synthèses.

La coutume s’est introduite et généralisée, depuis la publication de la Critique de la Raison pure, d’affecter spécialement le nom de sujet à la conscience du moi, — on pourrait même assez souvent comprendre que c’est de la propre conscience du philosophe et de l’auteur,