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XX

Contradiction intrinsèque des théories de l’Inconditionné. — Kant, par une dérogation à son propre et formel principe touchant l’emploi des catégories, à laquelle nous venons de faire allusion, s’est servi de la loi de causalité, qui, d’après lui, n’est applicable qu’aux phénomènes, pour démontrer l’existence des objets transcendantaux ; il a attribué à ces objets rapportés à nous une action efficiente à laquelle nous serions redevables de certaines de nos notions fondamentales. Il ne s’est pas seulement démenti lui-même, en rompant le lien qui rattachait sa logique au relativisme, en transportant l’action au delà de la relation ; il faut dire, pour aller au fond, qu’il s’est servi d’une relation, la cause, pour instituer un sujet qui ne pouvait se poser inconditionné, comme il le voulait, sans exclure toute définition, toute attribution possibles. La causalité est une notion bilatérale, la cause est conditionnée par l’effet. Veut-on faire abstraction du rapport et réaliser un terme indépendamment de l’autre, on tombe dans cet excès de métaphysique réaliste qui consisterait à donner pour cause de toutes choses la Cause. D’autres diraient l’Intelligence, ou le Désir, ou l’Être, etc., supposés dans l’état inconditionné ; mais ces termes généraux sont pris de la connaissance de nos conditions, ou bien ils n’ont aucun sens.

Kant à laissé une grande obscurité, peut-être volontaire, sur la question de l’origine des relations, en un système qui les fait descendre de l’Absolu ; mais il est certainement l’auteur de la révolution philosophique