Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/98

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nous regardons comme le substratum des idées que nous connaissons » ; et il avait comparé la confusion du philosophe interrogé sur la nature de ce sujet d’inhérence, à l’embarras de l’Indien à qui l’on demande ce que ce peut être qui porte l’éléphant, qui porte la baleine qui porte la terre ! Mais Locke, en ses analyses peu serrées, ne poursuit pas à fond les conséquences d’une méthode qui exigerait pour tout sujet de connaissance « une idée particulière, distincte et positive ». Hume, lui, se soumet à cette exigence. Mais le principe de relation, ou connexion, entre les idées, hors de l’application duquel il n’existe ni idées pour notre esprit, ni esprit, ni objets représentés pour nous dans la nature, ce principe ne peut être donné que par l’idée de ce principe, par l’idée de la relation comme loi constitutive de l’être pour la connaissance, et Hume entend bannir de l’esprit les idées générales. Après avoir rejeté le réalisme de la substance, comme lien des phénomènes de l’esprit, aussi bien que comme lien des phénomènes de la matière, il n’aperçoit aucun moyen d’en remplacer la fonction imaginaire, pour se rendre compte de la composition et de l’ordre des idées.

« Quand nous parlons de la personne, ou de la substance, dit-il, nous devons joindre à ces termes une idée, autrement ils sont inintelligibles. Toute idée est dérivée d’impressions antécédentes, et nous n’avons nulle impression de personne, ou substance, comme de quelque chose de simple et d’individuel. Nous n’en avons donc non plus aucune idée en ce sens-là. Je ne puis percevoir ma personne sans une ou plusieurs perceptions, et je ne puis percevoir aucune chose excepté ces perceptions. C’est donc de la composition des perceptions que se forme la personne. Nous n’avons ni d’une