Page:Restif de la Bretonne - Mes inscripcions, éd. Cottin, 1889.djvu/148

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se promener sur le port aux tuiles[1], on aurait dit une rose au milieu des marguerites d’un parterre. Cette jeune fille contribua, sans le savoir, à me guérir de ma honteuse passion pour Virginie. Ce fut ce qui me la rendit chère ; je m’intéressais à elle, je lui souhaitais du bien.

En 1779, elle fut recherchée par un charcuitier, qui l’épousa en 1780. Le 11 juillet, je revenais de l’imprimerie, où l’on commençait mes Contemporaines[2], lorsque, vis-à-vis les Grands-degrés, je vis la jolie Poinot, l’aînée, descendre d’un remise avec un gros bouquet de mariée ; sa petite sœur, plus jolie qu’elle, et moins aimable, était dans la voiture : je sçus que ma voisine était au grand jour de ses noces. Je me sentis attristé, je ne sais pourquoi. Après mon dîner, je courus sur mon Ile, où j’écrivis à la hâte, sur la pierre du premier anglet, en sortant par le Pont-rouge, à droite.

Qu’on imagine avec quel intérêt je revois cette date tous les ans ! Surtout depuis que j’ai appris que mon aimable voisine était mal mariée !…

Elle demeure aujourd’hui presque vis-à-vis mes fenêtres, dans la rue des Bernardins[3] ; je lui ai écrit le 28 auguste : le 29 au soir, j’ai

  1. Au quai de la Tournelle, vis-à-vis les Miramiones, dont la maison est devenue, aujourd’hui, la pharmacie centrale des hôpitaux.
  2. M. Paul Lacroix se demande, dans sa Bibliographie des ouvrages de Restif, si les Contemporaines ont été véritablement imprimées à Leipsick, comme le titre l’indique. On voit qu’elles furent imprimées à Paris.
  3. Comprise aujourd’hui entre le quai de la Tournelle et la rue des Écoles.