Page:Restif de la Bretonne - Mes inscripcions, éd. Cottin, 1889.djvu/170

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adresse ; mais quel motif aurais-je eu de tromper cet homme, tout méprisable qu’il était[1] ?
Car voici l’existence de Lavalette : il est avocat, mais il a été, dit-on, chassé du Palais.
Il est censeur royal, mais il dit qu’on ne le charge que d’objets de confiance, c’est-à-dire de l’examen de livres qu’on veut supprimer, ou laisser circuler très-tacitement. Il se flatte d’avoir les espions de la police à ses ordres : il se peut qu’il en ait quelques-uns. Il fait beaucoup valoir son crédit : il a celui des censeurs, qui est d’avoir toujours raison. Du reste, c’est un homme aux expédiens, dont l’aide est un huissier nommé Sirjan (aujourd’hui procureur) ; ces deux hommes font ensemble des affaires ténébreuses qui rapportent, parce qu’on a, pour complice, une des parties qui veut bien être trompée, pour faire plus de mal à son adversaire.
Tel est l’homme qui me sonda fort adroitement, et avec lequel je me compromis un peu[2].
J’étais indigné contre Sara qui, depuis sa nouvelle passion pour un homme digne d’elle[3], n’avait plus pour moi les moindres égards. Je dis à mon rival qu’elle avait le cœur dur : là-dessus, mon spadassin avocat prend feu très-ridiculement, il veut que Sara ait le cœur

  1. Sa franchise était-elle aussi désintéressée qu’il veut bien le dire ? On n’informe guère un rival pour le plaisir de lui être utile.
  2. Ces renseignements sur Lavalette ne se trouvent pas dans Monsieur Nicolas.
  3. C’est-à-dire assez riche pour elle.