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AU PAYS DES KANGAROUS

— Nous agirons sagement, à mon avis, dit Arthur, en faisant une fausse sortie, pour laisser croire à nos ennemis que nous tenons toujours et que nous les bravons.

— Excellente idée, monsieur Arthur ! s’écria Wilkins. Nous leur fournirons une volée de flèches pour leur faire nos adieux. »

Le lendemain matin, quand tout était prêt pour quitter la caverne, après l’absorption d’un repas substantiel, Ruth, s’étant avancée du côté de la muraille qui barricadait l’entrée de la caverne, recula avec terreur et annonça aux assiégés que les hideux sauvages étaient toujours là.

Chacun se précipita du côté des meurtrières, et on put voir alors les indigènes qui avaient apporté d’énormes brassées de bois sec devant la caverne et avaient allumé un feu avec l’intention apparente de s’établir en cet endroit pour monter la garde. Mais les coquins se tenaient sur leurs gardes, et ils avaient eu la précaution de se placer sur le côté, de façon à ne pas être atteints par les flèches des assiégés. Cette surveillance était réellement vexatoire.

« Allons ! dit alors Wilkins, il va falloir « brûler un peu de poudre aux moineaux » pour empêcher ces jolis « blondins » de nous épier et de parvenir peu à peu à se glisser au milieu de nous. Voyez là-bas ce moricaud peint en rouge qui frappe le sol avec sa hache c’est celui qui a eu l’intention de m’atteindre avec sa flèche, dont j’ai senti le sifflement à mon oreille gauche. Voyons, monsieur Arthur, laissez-moi faire. Je ne veux pas le tuer, mais je compte lui faire une peur épouvantable. »

Arthur, nous l’avons dit, redoutait fort de tirer inutilement un coup de feu ; mais l’arrogance du sauvage et les chocs qu’il donnait à la muraille de pierre lui prouvèrent qu’il fallait en finir. Comme Wilkins lui promit de ne point blesser mortellement ce redoutable champion, l’aîné des Mayburn chargea le fusil et le remit aux mains du convict, qu’il savait être un très habile tireur.

Wilkins choisit attentivement son but et attendit le moment favorable pour tirer. Le sauvage levait sa hache pour abattre une pierre, lorsque la balle le frappa à l’épaule. Un cri de douleur répondit à la détonation et le blessé tomba la face contre la terre. Tout aussitôt la troupe qui l’entourait se prit fuir du côté des bois : deux indigènes seulement s’empressèrent de relever leur compagnon, qu’ils emportèrent en poussant d’affreux gémissements.

« Nous voilà débarrassés pour quelque temps de ces messieurs, fit Wilkins. Allons ! mettons-nous en route.

— Je voudrais bien m’emparer de la hache, dit alors Jack. Je ne crois pas, monsieur Arthur, que vous trouviez quelque objection à cela.

— Ni moi non plus, s’écria Gérald : les dépouilles du vaincu appartiennent au vainqueur. »

Max Mayburn, avec cette bonhomie qui était son partage, fit bien quelques objections, qui ne furent point prises en considération par ses autres compagnons ; mais Arthur déclara qu’il ne fallait rien prendre aux sauvages, et Jack dut se résigner.

Sans perdre plus de temps, tous les assiégés, chargés de leurs paquets,