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AU PAYS DES KANGAROUS

rentes mares d’eau que la pluie avait formées dans les replis du terrain, ils rencontrèrent sans les déranger, des « amis des colons » et des volées de palmipèdes de toute espèce. Plus loin, dans les champs d’avoine, ils firent lever des compagnies de jolis oiseaux ressemblant fort à des cailles, mais dont la tête était ornée d’une aigrette très élégante.

Déjà leurs sacs étaient pleins de gibier, lorsque, ayant aperçu une harde de kangarous, ils résolurent de leur faire la chasse. Les animaux cherchèrent d’abord un refuge dans un bouquet de bois, où Wilkins et Jack les poursuivirent. Pendant ce temps-là, les autres chasseurs attaquèrent deux émeus qu’ils ne purent atteindre. Ils revinrent alors, très désappointés, du côté de l’endroit où se faisait la chasse aux kangarous.

À ce moment-là, le coo-ee des sauvages frappa leurs oreilles. Ces cris provenaient du bois où les animaux s’étaient réfugiés, Il n’y avait pas un moment à perdre, et tous ensemble, se glissant sous les arbres de la forêt sombre, songèrent à regagner la tranchée taillée à travers le bois.

Jack et Wilkins ne se trouvaient pas avec les trois chasseurs, et Gérald proposa à Arthur de les héler à haute voix.

« Ce ne serait pas prudent, mon ami, répliqua, celui-ci. D’ailleurs, nos deux compagnons doivent avoir entendu aussi bien que nous l’appel des sauvages. Mon avis est qu’ils se sont cachés pour livrer passage à nos ennemis. Laissons donc ouverte l’entrée du bois, que l’un de nous gardera. C’est moi qui resterai ici. En attendant, portez à la grotte les sacs de gibier, et revenez bien vite avec mon fusil et des munitions. Je vais me cacher derrière ces buissons afin d’attendre les absents. »

Hugues et Gérald hâtèrent le pas et remirent aux mains de Max Mayburn les sacs qu’ils rapportaient, dans lesquels se trouvaient quelques cailles, puis ils s’éloignèrent afin de rejoindre Arthur.

L’aîné des Mayburn les attendait avec impatience. Gérald se hissa sur le tronc élevé d’un arbre, du haut duquel il pouvait tout voir dans la plaine. Tout à coup les deux frères l’entendirent s’écrier :

« Ils l’ont tué ! pauvre diable ! C’est fait de lui ! il ne reviendra plus. Voici Jack qui court de ce côté-ci.

— Que dis-tu ? demandèrent Arthur et Gerald.

— Oui, Jack s’avance seul. Wilkins n’est pas avec lui, et certes, Jack n’aurait pas abandonné son compagnon s’il était encore en vie. »

En effet, le frère de Ruth revenait seul : on le voyait très bien, et quand il fut à portée de voix des trois chasseurs, ils comprirent, à le voir pâle et défait, qu’il lui était arrivé quelque chose de très grave.

Jack se jeta dans l’ouverture en s’écriant :

« Fermez vite, monsieur Arthur, je me sens mal et ne puis vous aider.

— Où est Wilkins ? » demanda Hugues avec anxiété.

Jack éclata en sanglots.

« Oh monsieur Hugues répondit-il les sauvages se sont emparés de lui, et, malgré mes efforts, je n’ai pu le retirer de leurs mains.

— Mais n’y a-t-il plus d’espoir ? Crois-tu qu’ils attentent à sa vie ? demanda Arthur avec anxiété.