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tion de dix-huit sous-chefs de musique, ce qui n’indique guère qu’il songe à supprimer les musiques. Celles-ci seront donc maintenues évidemment, et nous n’avons à cet égard aucune crainte à ressentir.

La direction du Grand Théâtre de Gand vient d’arrêter les dates du festival Saint-Saëns qu’elle avait promis d’organiser au cours de cette campagne. Trois représentations seront données, en la présence et avec le concours du maître français qui interprétera lui-même certaines de ces œuvres. Le jeudi 5 novembre, Samson et Dalila, le samedi 7 novembre, Phryné et une partie concertante à grand orchestre où seront entendus M. Saint-Saëns et M. de Greef, l’excellent professeur de piano du Conservatoire royal de Bruxelles ; enfin, le dimanche 8 novembre, Henri viii

La suppression du Congrès international de musique, qui devait avoir lieu à Berlin, est regrettable, car certaines questions très intéressantes devaient être traitées, l’une entre autres de M. Eug. d’Harcourt, relative à la disposition de l’orchestre. On sait, en effet, qu’à Bayreuth l’orchestre est invisible, c’est-à-dire couvert.

Or, cette disposition n’est pas exempte d’inconvénients. Dans certains passages, il arrive notamment que l’orchestre couvert est absolument sacrifié à l’ensemble vocal et qu’on ne l’entend plus suffisamment. M. Eugène d’Harcourt a donc établi, en collaboration avec M. Mutin, un dispositif qui permet au chef d’orchestre d’augmenter, à son gré, la sonorité de l’orchestre couvert au moyen de plusieurs jeux de persiennes mobiles. C’est fort ingénieux et cela paraît assez pratique.

Nous souhaitons que l’expérience en soit faite incessamment.

La direction du théâtre de Magdebourg annonce qu’elle donnera incessamment le Maître de Chapelle de Ferdinand Paër dans un arrangement nouveau de M. Von Kleefeld L’œuvrette de Paër jouée pour la première fois en 1821, à Paris, au théâtre Feydeau et restée au répertoire de l’Opéra-Comique, n’est guère connue en Allemagne. On sait que l’on en joue très souvent à Lyon, le 2e acte comme lever de rideau.

Berlioz était fort animé contre les arrangeurs. Dans un de ses meilleurs jours de verve, alors qu’il rédigeait ses Mémoires « anthumes », il les apostrophait de la sorte :

Non, non, non, dix millions de fois non, musiciens, poètes, prosateurs, acteurs, pianistes, chefs d’orchestre de troisième ou de second ordre, et même du premier, vous n’avez pas le droit de toucher aux Beethoven et aux Shakespeare, pour leur faire l’aumône de votre Science et de votre goût… »

Ayant ainsi dit leur fait d’une façon définitive aux arrangeurs, Berlioz retrempa sa plume dans l’encrier pour doter de récitatifs le Freischütz de Weber.


NÉCROLOGIE

Victorin Joncières, qui est mort la semaine dernière, était né à Paris en 1839. Il ne s’attacha à l’étude de la musique qu’après avoir essayé de la peinture. Ses œuvres se ressentirent de cette éducation musicale tardive. Cependant leur style fut toujours correct et leur structure solide : surtout il y eut en elles une franchise et une dignité rares.

Les temps où il vint étaient troublés pour la musique. Joncières se donna alors une double originalité : il fut l’un des premiers à comprendre Wagner et à proclamer — sans palinodie subséquente — sa grandeur : et cependant il ne l’imita jamais. Il resta fidèle à l’esprit et à la forme de l’ancien opéra. C’était témoigner deux fois d’une belle sincérité artistique.

Il connut une fois le grand, le vrai succès, avec Dimitri, représenté en 1876 au Théâtre-Lyrique et où l’on trouve, parmi quelques formules bien vieillies, des moments d’une assez forte émotion, des pages aussi d’un joli sentiment pittoresque. Ses ouvrages précédents : Sardanapale, le Dernier Jour de Pompéi avaient été moins heureux ; le cadre absurdement vaste de l’Opéra ne porta point bonheur à la Reine Berthe, ni à Lancelot ; mais le Chevalier Jean, qui fut joué à l’Opéra-Comique en 1885, dut à une situation admirablement émouvante une nouvelle réussite.

Ses œuvres symphoniques : la Symphonie romantique, la Sérénade Hongroise, la Mer, ont tenu au répertoire des concerts dominicaux une place importante.

M. Joncières fut pendant 25 ans critique musical à la Liberté.

Le Propriétaire-Gérant : Léon Vallas.

Imp. Waltener & Cie, 3, rue Stella, Lyon.