Page:Revue de Métaphysique et de Morale, vingt et unième année - 1913.djvu/266

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et bien digne d'intérêt: elle envisage le social comme social et tend a en rendre compte par autre chose que par l'inexplicable rôpétitio» d'un même caractère individuel.


II


Mais Platon se pose aussi une autre question, celle de l'origine réelle des sociétés ainsi constituées. Il ne s'agit plus de savoir quels sont les conditions et les éléments impliqués en fait par un état social. Nous devons maintenant envisager dans son histoire la formation d'un tel état en le prenant à ses débuts, et en retracer l'évolution par rapport aux conditions que l'analyse a permis de reconnaître. Il y a là une distinction vraiment scientifique, et, à tout prendre, on peut dire que Platon a fait effort pour traiter scientifi- quement cette nouvelle question. Ce n'est pas à dire qu'il y ait plei- nement réussi, même par rapport à l'état des connaissances de son temps, ni qu'il l'ait traitée comme la traiterait un savant moderne. S'il transforme en elfet la légende, ce n'est pas à coup sûr sans en, garder les cadres et même les procédés d'exposition. Mais le mythe sert au moins de matière à la réflexion philosophique et de vête- ment à des doctrines où l'auteur voit des hypothèses vraisemblables. C'est le cas pour ce tableau de l'histoire ancienne de l'humanité, que nous offre d'abord le Politique (269 o-274 d) et que reprend plus tard le A" livre des Lois (7J3 c-714 d). Sous le règne de Cronos, les hommes, nous dit Platon, naissaient de la terre, à laquelle ils- retournaient pour ressusciter ensuite. Il n"y avait alors ni sociétés, ni famille, ni mariage. Les hommes formaient un troupeau, dont le pasteur était Dieu lui-même, tandis que les troupeaux des bêtes — c'est-à-dire leurs espèces — avaient seulement les démons pour bergers. Dans cet âge d'or, point d'animaux féroces; les hommes et les bêtes unis par un langage commun; les premiers uniquement préoccupés de l'avancement de la science ; un climat d'une exquise douceur; la terre produisant spontanément tout ce qu'il faut pour la subsistance des vivants. Or cet état de choses correspond à une période de la vie du monde pendant laquelle Dieu en dirige la marcIie. Mais, cette période achevée, il abandonne le monde à son mouvement propre et une nouvelle période commence. Klle est caractérisée par un mouvement inverse du. premier, et notamment